réédition Lignes | 2016

Philosopher à l’Arc

Le titre de cet ouvrage désigne littéralement ce qui fait son contenu : une autre condition, une autre expérience de la pensée. Donc aussi une autre forme de pensée résultant de la pratique effective, par son auteur, de la chasse à l’arc.
Chasser à l’arc, c’est apprendre à disparaître. La portée courte des flèches obligeant à s’approcher au plus près des bêtes, il faut impérativement connaître d’elles tout ce qui peut s’en apprendre et en tirer toutes les conclusions pour se rendre pratiquement inexistant à leurs yeux. Mais à cela il y a une conséquence : à force de se rendre insignifiant, de quitter toute apparence humaine, on cesse aussi d’être soi. On devient, pour partie au moins, ce que l’on traque. Se tenir au plus près des bêtes c’est aussi fréquenter au plus près l’animalité, sa propre animalité originelle ; enfouie et pourtant toujours si proche.

Confondu avec l’arc, avec la cible et avec tout ce qui l’entoure, livré à la seule vision et à la seule sensation pour toute prise avec le monde, l’archer n’est plus seulement un individu qui pense, qui raisonne et tente de maîtriser ce qui advient, il devient le théâtre de combinaisons de sens et de significations jusqu’alors tenues pour étrangères les unes aux autres. Il se fait lui-même scène d’un collage, d’un rendez-vous imprévu de significations et de décisions qui semblent se prendre hors de lui et de sa volonté.

« Philosopher à l’arc » c’est, en somme, laisser se développer les pensées qu’appelle et mobilise cette expérience à la fois physique et mentale, archaïque et actuelle, de la présence au monde. Expérience où défilent et se côtoient une succession de visions, de présences et de réminiscences, où rôde la sensation d’une origine retrouvée.

éditions Lignes

éditions Châtelet Voltaire | 2013

Philosopher à l’arc

– Mais qu’est-ce qui vous pousse avec tant de ferveur vers cette quête de la bestialité, vers cette incursion dans le monde ténébreux de notre espèce que la « civilisation » s’emploie depuis des millénaires à rejeter de toutes ses forces ?
– Le goût de la vérité, ni plus ni moins ! Lui aussi passait jusqu’à récemment pour ce qu’il y a de plus civilisé chez l’homme. Mais il est vrai qu’il passe maintenant, et pour un nombre de plus en plus grand, pour ce qu’il y a de plus stérile, de plus archaïque, de plus vain.

Jean-Paul Curnier

Deux minutes papillon | France Culture | 22 février 2016


On ne parle pas la bouche pleine | Alain Kruger | France Culture | 26 juillet 2016

Le feuilleton de Jacques Henric | Art Press n°412 – juin 2014

Art Press N°412 | Juin 2014